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mardi 30 avril 2019
lundi 29 avril 2019
Bleu mystère
Chère
jeune amie,
…
En
repensant à Marcel Duchamp, écrivant à propos de Breton « Il
était l'amant de l'amour dans un monde qui croit à la prostitution
», on se demande ce qu’il faudrait écrire aujourd'hui, dans un
monde qui croit à la commande de viols ou de meurtres d'enfants en
direct, sur Internet. Par la plèbe — d’en haut ou d’en-bas.
Et
encore le monde, à l'époque, se limitait-il, dans l’esprit de
Duchamp, à l'Europe et à l'Amérique du Nord.
Pour
le reste, laissez tomber la pornographie.
Il
n’y a qu’un seul secret : c’est un poète « populaire »
(qui fait braire tous les écrivaillons subventionnés — ou non —,
branchés — ou pas —) qui l’a énoncé : « S’il
n’entend le cœur qui bat, le corps non plus ne bronche pas. ».
En
fait d’orgasmes, ce que la pornographie vous montre ce ne sont que
des spasmes et des convulsions (plus ou moins violentes) chaotiques
et inabouties : l’orgasme est un enlèvement à
deux,
en comme-un,
dans un même mouvement, harmonique :
le reste, c’est de l’onanisme.
Les
convulsions (celles de la mort ((pauvre Bataille)), celles de
l’excitation onaniste etc.) fascinent les injouissants, incapables
de s’abandonner à l’extase
harmonique :
on dirait des singes qui braillent et qui tapent sur un piano,
incapables d’en jouer mais hypnotisés par l’objet.
L'onanisme,
seul, à deux, ou en groupe, se porte donc mieux que jamais : il
est seulement devenu grand-guignolesque
et informatisé.
…
On peut dire, comme vous le faites, que nous avons découvert le vaccin contre la rage sexuelle (grâce à W. Reich, qui avait décrit la « fonction de l’orgasme », il y a maintenant près d’un siècle).
Mais
nous n’avons pas découvert le moyen d’en faire profiter qui
que ce soit : entre l'analyse, le plus souvent indispensable, et la création de situations de
liberté, d'un côté, et le moment d’extrême misère matérielle,
intellectuelle et sentimentale que nous connaissons, de l'autre, à
la veille de catastrophes financières et géopolitiques mondialisées
(sans compter les accidents atmosphériques les plus surprenants et les effondrements écologiques en cours), la découverte
de l’ « extase harmonique » et celle de l’égalité
amoureuse entre les femmes et les hommes,
dans la « jouissance contemplative », paraissent
dérisoires : nul avant nous ne les avait pourtant si clairement
définies, — ni si heureusement vécues.
Et
je suis très heureux d’avoir retrouvé chez Rimbaud cette
expression « extase harmonique », qui m’était venue pour décrire,
parfaitement, cette forme si accomplie et si poétique de l’amour.
« Aux
accidents atmosphériques les plus surprenants
Un couple de jeunesse s'isole sur l'arche,
— Est-ce ancienne sauvagerie qu'on pardonne ? —
Et chante et se poste. »
Un couple de jeunesse s'isole sur l'arche,
— Est-ce ancienne sauvagerie qu'on pardonne ? —
Et chante et se poste. »
Pour
le reste, que vous dire : l’onanisme « récréatif »,
à deux ou en groupe, c'est ce que me proposaient mes jeunes amies, tribades et
radicales, de l'underground parisien. (Dominique S. Lettre ((clic))
C'est
aussi ce qu'était en train de devenir ma relation avec F. , relation
qui avait pourtant bien commencé, comme le montrent cette lettre (clic) et ce collage.
![]() |
Poèmes-collages. 1987
|
J'ai
rompu, d’un coup, avec tout le monde, sans savoir où cela me
mènerait — sinon à la solitude. J’ignorais que la solitude à
deux serait mon salut.
J'avais
connu la jouissance sentimentale : les fantaisies, plus ou moins
récréatives, plus ou moins féroces, je ne voulais pas m'y
résigner.
C'est ce
que traduit ce poème-collage de l’époque.
La
chance m'a souri : j'ai rencontré Héloïse à ce moment-là ;
précisément alors que j’étais en train d'expliquer, à un
camarade de l'époque, que j'étais décidé à rester seul, au moins
un an, ce qui ne m'était jamais arrivé depuis le début de ma vie
sentimentale.
Et
c’est à l’instant précis où je venais de dire cela que j’ai
vu une magnifique brune s'installer sur sa serviette de bain.
Après
une cour de trois mois, je fus enfin adoubé. Vous connaissez la
suite.
Et
depuis, j'ai remplacé les excitations pornographiques, que provoque
l’injouissance, par l’éblouissement poétique et contemplatif
des « ressouvenances galantes » ; les jeux et la camaraderie
sexuels (auxquels les débuts harmoniques
de l’amour sentimental, qui m’avait toujours guidé, laissaient à
chaque fois place) par l’amour
contemplatif — galant
et les états amoureux poétiques et mystiques, — post-orgastiques.
Et
je me suis fait le secrétaire de ces sensations de surbrillance
sensualiste et
de
fusion océanique avec le monde,
pour que le souvenir ne s’en perde pas, — même si la masse de
perdition, dont jamais je ne fus, n'en a et n’en aura jamais que
faire.
Mais
bien sûr, quand je dis : « j’ai remplacé », je
devrais dire : « ont été remplacées ».
Je
n’y suis pour rien : je constate.
Le
secret, c’était aussi : ni vin, ni fumée, ni poudre, ni
cachets, ni fréquentations oiseuses : ce que ne permet jamais
la vie en société du spectacle.
…
Qui, de Goethe ou de Schopenhauer, puisque vous aimez plus que tout ces auteurs, vous a d'ailleurs conseillé de vous gaver de poudre, de pilules, de fumée et d’alcool, pour vous joindre à un troupeau de veaux hystériques en train de « s’éclater » ?
Napoléon, de son côté, disait : « Il faut des fêtes bruyantes aux populations, les sots aiment le bruit, et la multitude c'est les sots. »
Pourquoi devrais-je les contredire, moi qui ai vu naître, en 1983, sur les hauteurs de Vagator,
avec cette première rave-party appelée « Bal Champêtre »,
sa « special music » et ses premiers ecstas, cette
arnaque anti-poétique et spectaculaire de la « fête »
telle qu’elle s’est répandue depuis sur toute la planète, et
qui suis donc un peu mieux renseigné que ceux que je viens de citer
sur ses tenants et ses aboutissants ?
N’ai-je pas écrit :
Éclater
ou jouir
(goûtez ce dernier mot !)
Voilà la question centrale de l'Humanité
(goûtez ce dernier mot !)
Voilà la question centrale de l'Humanité
…
Il
s’agit de retrouver ce que du temps de Lin-tsi on appelait
l’Homme
vrai sans situation,
pas le sale gosse pervers, sadique ou masochiste, et ses fixations
pré-génitales toutes plus malheureuses et plus démentes les unes
que les autres, mais notre cœur de souveraineté — mystique, sans
parole et sans appel —, et de déployer à partir de là cette forme de l’amour
qui n’appartient qu’à lui et à sa capacité d’abandon à
l’extase et à la jouissance — puissante, profonde, fortunée —
amoureuses et charnelles.
Et
pour le reste, souvenez-vous :
L’amour
est un éclat, rouge.
Sinon,
abordez
L’hiver
en dame esquimau
À
vous,
R.C. Vaudey
Post-scriptum
Publier
le Manifeste sensualiste, en 2002, au moment même où s’est
démocratisé cet accès informatique à la violence défoulée des
pulsions pré-génitales, destructrices et auto-destructrices, était
certainement une erreur. Mais en quoi cette publication serait-elle
plus judicieuse aujourd’hui ?
Et en fait de fête, faites donc ce qui vous plaît. Gardez cependant toujours en tête la possibilité de la chance poétique, — et ne vous abîmez pas. Ni le cœur ni le corps.
Et en fait de fête, faites donc ce qui vous plaît. Gardez cependant toujours en tête la possibilité de la chance poétique, — et ne vous abîmez pas. Ni le cœur ni le corps.
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samedi 27 avril 2019
EXTASE HARMONIQUE… HARMONIE EXTATIQUE… (Pantoum sensualiste)
L'amour
contemplatif — galant
Naît
dans la volupté et les délices enchanteresses
Des
transports de l'amour charnel et de ses caresses
Dans
cette forme de l'amour charnel
Qui
trouve son accomplissement
Dans
l'orgasme génital surréel
Tel
qu'il flamboie
— Apothéotique
—
Dans
l'extase harmonique
Qui
elle-même ouvre à une forme épiphanique
Du
sentiment océanique
État
fait de contemplation et de transport
De
calme et de ravissement
De
certitude et de vertige
Où
l'on se retrouve autre en devenant soi-même
— Et
ce parfois trois jours durant
Qui voit s'ouvrir le Temps où vibrant sur sa tige
Chaque
fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Les
sons et les parfums tournant dans l'air du soir ;
— Valses
extatiques et langoureux vertige ! —
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Un
piano jaillit comme un cœur qui voltige ;
Valses
extatiques et langoureux vertige !
Le
ciel est beau et bon comme un grand reposoir.
Un piano jaillit comme un cœur qui voltige ;
Un piano jaillit comme un cœur qui voltige ;
Un cœur tendre, qui est ce Présent aux vastes moires !
Le
ciel est beau et bon comme un grand reposoir ;
Le
soleil resplendit dans le Temps qui se fige.
Un cœur tendre, qui est ce Présent aux vastes moires,
Du
passé lumineux recueille tout vestige !
Le
soleil resplendit dans le Temps qui se fige…
Tout
souvenir par moi luit comme un ostensoir…
Et qu'est-ce auprès de cette félicité
Que
l'épilepsie d'une chair ébranlée
Durant
trois minutes par un coït masturbatoire
— Eût-il
duré trois journées ! —
Ou
par n'importe quelle autre forme illusoire
De
l'auto-érotisme — collectif ou solitaire — exutoire ?
C'est
cette forme inouïe
— Au
sens strict —
De
l'amour qui nous ravit
Et
nous rend bien gracieux et sades
— Comme
il sied aux deux seuls Antésades… —
Et
qui me fait jouer avec de vieux amis passés
— Et
que j'aime —
Que
la vie et l'amour auront moins gâtés
Dont
je détourne les poèmes
Pour faire ceux que je dicte
Pour faire ceux que je dicte
Avant
de retourner
Aux
valses extatiques
Aux
langoureux vertiges
— Et
aux autres prodiges… —
Que
vous voulez bien m'accorder —
Le
2 juin 2016
R.C.
Vaudey
Journal
d'un Libertin-Idyllique (Illuminescences) 2016
Pour
Charles Baudelaire et Albert Caraco
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mercredi 24 avril 2019
Renaissance printanière
Dans
l'incroyable
Dans
l'indicible du printemps
On
roule dans le monde —
enivrés
L'après-midi
en plein été
Le
soir dans une douceur du monde vaporisée
Quel
éther subtil
Éblouit nos esprits au bonheur dociles ?
Le
cornet à bouquin
— Qui
marque
– Selon
la symbolique de son époque –
Les Ténèbres —
Tout
serpentin
Est
en bois nuisible aux humains
— If
Noyer
—
Son
pendant
Le
cornet muet
— Qui
marque le Ciel —
Droit
et lisse
Est
en bois bienfaisant
— Fruitier
Olivier
—
L'ensemble était émouvant
Surprenant
L'ensemble était émouvant
Surprenant
La
folie du village de D.
— Elle
—
Est
jaune et verte
Exquise-inattendue
— Son
nom est Mon
désir
Je
peux encore ajouter qu’au matin
J'avais
quand même croisé
— Sur
son tracteur —
Jésus
ressuscité !
— À
Pâques, on ne peut pas moins… —
En
la personne de mon voisin…
Joie subtile-plénière
Et bonheurs de renaissance printanière…
Le 22 avril 2019
Journal
d’un Libertin-Idyllique (Illuminescences) 2019
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samedi 20 avril 2019
jeudi 18 avril 2019
Batifolages extatiques et mystiques
![]() |
BOTTICELLI
Le
Printemps
|
On
rentre dans l’avant-soir
La
lumière
— Sur
la rive gauche du Rhône —
Est
très belle
Elle
vient du couchant
Des
monts d’Auvergne
La
Beauté de Bach m’a fait pleurer (clic)
Cet
ensemble si beau
Si
parfait…
Le
clavecin
Le
hautbois d’amour
Le
violoncelle
L’alto
Les
violons
Et
le basson…
La voix d'Anna
La voix d'Anna
La
beauté même des instruments
Bach
et son art gigantesque du contrepoint
Qui
nous éblouit
Nous
submerge
Et
— Finalement
—
Nous
fait fondre en larmes
La
beauté de ce plateau encore sauvage
— En
rentrant —
Qui
s’étale jusqu’à l’horizon
Avec
— Comme
cantonade —
Le
souvenir de notre amour
De
nos batifolages
— Extatiques
et mystiques —
Dans
nos cotonnades
— Où
se mêle le lin blanc —
Fait
— Avec
notre amour des concerts —
Un
écrin parfait
Et
un tableau doux et serein
Pour
caresser
Et
faire rayonner nos âmes
Au
sortir du concert de l’amour
— Qui
nous enivrait il y a quelques jours
On
croise bien sûr peu de monde
Sur
ces routes isolées
— Mais
le reste du monde va son cours…
Journal d’un Libertin-Idyllique (Illuminescences) 2019
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lundi 15 avril 2019
lundi 8 avril 2019
jeudi 4 avril 2019
La jouissance de l’univers
Cher ami,
Quelle erreur de croire qu’un ouvrage, dont la première
idée doit remplir l’âme tout entière, puisse être composé à
des heures dérobées, interrompues ! Non, le poète doit vivre tout
à lui, tout à ses créations chéries. Il a reçu du ciel les plus
intimes et les plus précieuses faveurs ; il garde dans son sein un
trésor qui s’accroît de lui-même sans cesse, et il faut, sans
que rien le trouble au dehors, qu’il vive, avec ses richesses, dans
la félicité secrète dont l’opulence essaye en vain de
s’environner en amoncelant les trésors. Vois courir les Hommes
après le bonheur et le plaisir ! Leurs vœux, leurs efforts, leur
argent, poursuivent sans relâche… quoi donc ? Ce que le poète a
reçu de la nature, la jouissance de l’univers, le don de se sentir
lui-même dans les autres, l’harmonieuse union de son être avec
mille choses souvent inconciliables entre elles. D’où vient
l’inquiétude des Hommes,
sinon de ce qu’ils ne peuvent accorder leurs idées avec les choses
; que la jouissance se dérobe sous leurs mains ; que les objets
souhaités viennent trop tard, et que les biens obtenus ne font pas
sur leur âme l’impression que le désir nous fait augurer de loin
? La destinée a élevé le poète, comme un dieu, au-dessus de
toutes ces misères. Il voit s’agiter sans but les passions
tumultueuses, les familles et les empires ; il voit les énigmes
insolubles des malentendus, qu’un monosyllabe pourrait souvent
expliquer, causer d’inexprimables, de funestes perturbations ; il
s’associe aux joies et aux tristesses de l’humanité. Quand
l’homme
du monde traîne ses jours, consumé par la mélancolie, à cause
d’une grande perte, ou marche avec une joie extravagante au-devant
de sa destinée : comme le soleil fait sa course, l’âme tendre et
passionnée du poète passe du jour à la nuit, et, avec de légères
transitions, sa lyre s’harmonise à la joie et à la douleur. Semée
des mains de la nature dans le domaine de son cœur, la belle fleur
de la sagesse s’épanouit, et, tandis que les autres Hommes
songent en veillant, et sont bouleversés par d’épouvantables
images, il sait vivre le rêve de la vie en Homme
qui veille, et ce qui arrive de plus étrange est pour lui en même
temps passé et à venir. Ainsi le poète est à la fois
l’instituteur, le prophète, l’ami des dieux et des Hommes.
Comment veux-tu qu’il s’abaisse à un misérable métier ? Lui
qui est fait, comme l’oiseau, pour planer sur le monde, habiter sur
les hauts sommets, se nourrir de boutons et de fruits, en passant
d’une aile légère de rameaux en rameaux, il devrait, comme le
bœuf, traîner la charrue, comme le chien, s’accoutumer à la
piste, ou peut-être même, esclave à la chaîne, garder la cour
d’une ferme par ses aboiements ! […
] Si seulement les Hommes
étaient faits comme les oiseaux, [… ] et, sans filer et
tisser, pouvaient couler d’heureux jours en de perpétuelles
jouissances ! S’ils pouvaient, à l’approche de l’hiver, se
transporter aussi aisément dans les contrées lointaines, échapper
à la disette et se préserver des frimas ! — Ainsi vécurent les
poètes, [… ] dans les temps où ce qui mérite
l’honneur était mieux apprécié ; ainsi devraient-ils vivre
toujours. Assez riches au dedans, ils demandaient peu de chose au
dehors. Le don de communiquer aux Hommes
de beaux sentiments, des images sublimes, dans un doux langage et de
douces mélodies, qui se pliaient à chaque sujet, enchanta jadis le
monde et fut pour le poëte un riche héritage. À la cour des rois,
à la table des riches, devant les portes des belles, on les
écoutait, et l’oreille et le cœur se fermaient à tout le reste,
de même qu’on s’estime heureux et qu’on s’arrête avec
ravissement, quand, des bocages où l’on se promène, s’élance
la voix touchante du rossignol. Ils trouvaient un monde hospitalier,
et leur apparence humble et modeste ne faisait que les relever
davantage. Le héros prêtait l’oreille à leurs chants, et le
vainqueur du monde rendait hommage au poëte, parce qu’il sentait
que, sans lui, sa monstrueuse existence ne ferait que passer comme
une tempête ; l’amant souhaitait de sentir ses vœux et ses
jouissances avec autant d’harmonie et de diversité que les lèvres
inspirées savaient les décrire, et le riche lui-même ne pouvait
pas voir de ses propres yeux ses richesses, ses idoles, aussi
magnifiques qu’elles lui paraissaient, illuminées par la splendeur
du génie, qui comprend et relève le prix de toute chose. Et quel
autre enfin que le poëte a figuré les dieux, nous a élevés
jusqu’à eux et les a fait descendre jusqu’à nous ?
Johann Wolfgang von Goethe
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lundi 1 avril 2019
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